L'apôtre développe son argumentation en trois points. Le dîner cultuel des convertis commémore le sacrifice du Christ (1 Co. XI, 23-26) qui manifeste la vérité de Dieu. L'unité de la communauté avec le Christ s'édifie autour de la coupe et du pain partagés en un même esprit (1 Co. X, 16-17). De même, Israël constitue son unité en partageant le sacrifice des pacifiques entre les convives et « l'autel » (Ibid. 18) (voir Lv. VII, 11-15) ; Yhwh recevant la part du feu (voir Lv. III). L'on voit que Paul use de métonymie afin d'éviter de nommer le dieu des Hébreux. « L'autel » est mis pour Yhwh. Paul ne peut pas dire qu'Israël partage avec Dieu, à l'autel du Seigneur. Ce serait dénier la valeur absolue qu'il donne au dîner des convertis. Il nuirait à la raison de laisser l'autel pour se rendre à la table. Il nous reste donc à comprendre qu'Israël fait bien son unité à l'autel, mais en l'absence de Dieu !
Le banquet sacrificiel des Hellènes constitue le troisième terme de la comparaison. Certes, il est aussi créateur d'unité, entre les convives et la divinité honorée. Mais cette unité n'a d'autre valeur que celle que peut donner un démon. Participer à une telle festivité consiste indubitablement à communier en un esprit démoniaque. L'adhérent peut se prétendre « fort » en sa liberté (1 Co. X, 22). Néanmoins, celle-ci ne saurait conduire à l'infidélité au Christ (Ibid. 22). Paul trouve dans les Ecritures une référence utile à sa démonstration (Ibid. 20) : « Ils (les Israélites) le rendent jaloux par des [dieux] étrangers, ils l'irritent par des abominations, ils sacrifient aux démons qui ne sont pas Eloah, à des dieux qu'ils ne connaissent pas, des nouveaux, récemment venus, que vos pères n'ont pas redoutés. » (Dt. XXXII, 16-17). La comparaison s'arrête là car Paul ne demande point que l'on sacrifie à Yhwh-Eloah.
Assuré de lui-même, le converti peut rétorquer à l'apôtre qu'il sait faire la part des choses et que l'esprit avec lequel il communie au dîner du Seigneur n'est en rien comparable à l'humeur qu'il peut déployer en se joignant à la table des banqueteurs. Paul introduit dans son argumentation la comparaison avec « l'Israël selon la chair » (1 Co. X, 18). Or, l'on connaît l'incompatibilité entre la foi et la Torah, le service du Christ et celui de l'autel (Ga. V, 4). A fortiori doit-on comprendre la contradiction entre le dîner du Seigneur et la table des démons.
« Vous ne pouvez pas boire la coupe du Seigneur et la coupe des démons. Vous ne pouvez pas être à la table du Seigneur et à la table des démons. » (1 Co. X, 21)
Paul tire de l'Ecriture l'argument selon lequel l'on ne peut boire aux deux coupes (voir Dt. XXXII, 16). Mais en ce même discours, il marque l'opposition entre « l'Israël selon la chair » (1 Co. X, 18), qui boit la coupe du Seigneur-Yhwh, et « l'Israël de Dieu » (Ga. VI, 16), qui boit la coupe du Seigneur-Christ. Paul peut bien nous dire qu'il n'y a pas deux Dieux (Rm. III, 30), s'il y a deux Israël, il y a nécessairement deux coupes et, par conséquent, chacun boit dans la sienne. Paul retourne l'Ecriture contre elle-même. L'on ne peut boire à la coupe du Christ et à la coupe de Yhwh (Rm. VII, 4) (Ga. V, 4) !