Ce n’est qu’en 1871 que le discours politique intègre le concept de laïcité comme représentation du peuple. Dans la pensée judéo-chrétienne, les clercs constituent une médiation entre le peuple et Dieu. Il est de leur devoir de servir celui-ci autant que celui-là. De cette façon, ils contribuent à rassembler les hommes et à constituer le peuple de Dieu en vue de la réalisation des promesses bibliques. Or, il apparut que les clercs détournaient à leur profit le service de Dieu.
La loi de 1905 sépare l’Eglise et l’Etat. Désormais, l’Eglise de France ne dépend que de Rome. L’Etat, quant à lui, s’impose une neutralité par rapport à l’Eglise catholique et à toutes les religions. Nous pouvons nous demander si la République qui succéda à la monarchie ne s’est pas éloignée, à son tour, du service du peuple auquel elle prétendait ? Peut-on dire assurément que la République assume aujourd’hui son devoir de laïcité ? Il semble que, face à un peuple qui perd son unité, la République ne parvient plus à garantir le rassemblement populaire qui la constitue et la légitime.
La République a fini par susciter une caste d’élus du peuple, à l’image de la caste des élus de Dieu chassés par la Révolution. Le transfert des pouvoirs s’est étalé sur un siècle. Il semble maintenant accompli. L’inquisition est assurée par les tribunaux républicains. La volonté d’instituer la liberté de conscience se limite finalement à la classe des élus républicains. Lorsque le parlement est amené à voter, en conscience, la loi d’interdiction du voile, cela signifie qu’il dénie tout jugement de conscience aux citoyens.
L’idée de République, qui rassemble le peuple, se défait dans la tourmente de la globalisation des échanges et des relations humaines. L’école ne forme plus un peuple laïque. Elle donne un enseignement prosaïque à une société humaine qui perd son unité par les flux migratoires. Saisi d’un sursaut républicain, le vieux peuple impose une réponse politique à la peur qui l’envahit. La volonté de donner un coup d’arrêt à l’islam fondamentaliste est dérisoire. La loi d’interdiction du voile se révèlera très vite comme un leurre.
La France a-t-elle la capacité à intégrer les populations envahissantes et celles-ci sont-elles prêtes à accepter les lois républicaines ? Telle est la question à laquelle la loi d’interdiction du voile islamique coupe court. La population musulmane est ici plus pauvre que la moyenne. Elle est la première responsable des actes d’incivilité. Peu après l’effondrement du World Trade Center, une foule musulmane a sifflé La Marseillaise lors du match de football qui opposait les équipes nationales de France et d’Algérie. Le nom d’Oussama Ben Laden a été scandé. Une classe dangereuse se crée sous l’effet conjugué de la discrimination sociale et du communautarisme.
La minorité musulmane représente près de dix pour cent de la population. En se renforçant, elle se politise et commence à descendre dans la rue. Dessinée par les conquêtes d’annexion, dont l’Occitanie n’est pas la moindre, la citoyenneté française s’est bâtie sur un concept d’universalité, non sur une appartenance ethnique à l’évidence introuvable. Le droit à l’existence des populations hétérogènes qui font la France a toujours été nié. Alors que la population nationale s’homogénéisait enfin, sous l’influence de la modernité, voici que surgit une ethnie sans terre sur le sol national !
Dans une grande majorité, les enseignants sont les héritiers de la pensée républicaine unique, anti-ethnique et anticléricale, qui nourrit la Révolution. Ils ont combattu la pensée religieuse représentée par l’Eglise catholique. Ils ont notamment veillé à interdire toute expression de la langue occitane et à ne rien enseigner de l’histoire d’Occitanie. Ils ont fini par vaincre une adversité fatiguée. Mais voici que l’islam surgit comme un adversaire dans la force de l’âge !
ous le savons, la légalité qui prétend organiser
le monde conformément à une volonté transcendante
constitue notre adversité. Quelle soit édictée
au nom de Dieu ou au nom du peuple, la loi revêt une sacralité
et une médiocrité spirituelle qui renvoie au règne
de Satan lui-même. En s’opposant à la conscience
de chacun, la loi nie la liberté de l’esprit. La loi qui
interdit le voile islamique dans les écoles de la République
française, contrarie la loi du dieu qui requiert le port du voile.
Il s’agit de deux lois positives contraires, établies par
deux institutions, humaine et divine, de même rang.
Si la question du voile a posé quelques problèmes dans le christianisme des origines, nous pouvons penser que les pauliniens s’opposèrent aux hébraïsants. Les femmes des Hébreux allaient habituellement voilées. Dans les temps bibliques, Jacob fut berné par Laban, son beau-père, en épousant Léa au lieu de sa sœur Rachel. Son erreur s’explique par le fait que le vêtement de noce dissimulait totalement le visage de l’épousée.
L’apôtre Paul enseigne le rejet de la loi. En contre partie, le chrétien doit approfondir le discernement de sa conscience, afin de conduire sa vie dans la perfection de l’esprit. La loi étant abrogée, il n’y a ni homme, ni femme, puisque c’est la loi qui sépare et ordonne les devoirs et les obligations de chaque sexe. Dans les Actes de Paul, nous lisons : « Et Thècle dit à Paul : « Je vais me faire couper les cheveux, et je te suivrai partout où tu te rendras. » (Ac Paul III, 25) ; « Elle se ceignit les reins, et, arrangeant sa tunique pour en faire un manteau à la manière des hommes, elle s’en alla à Myre. » (Ibid. IV, 15) Thècle ne reconnaît donc pas l’autorité de la loi, qui la désigne et la soumet en tant que femme.
Les lois positives, celle qui noue le voile et celle qui l’ôte, sont également mauvaises pour celui qui cherche à diriger sa vie selon l’esprit. L’enseignement paulinien veut que chacun agisse en conscience. Les forts choisissent la liberté. En aucun cas, cependant, ils ne doivent scandaliser les faibles. En tant que cathares visant le détachement du monde, l’islam ne nous concerne pas. Nous laisserions donc les jeunes filles musulmanes faire leur choix en conscience, puisque telle est la doctrine que nous suivons pour nous-mêmes, en toute chose.