Au Christ et à lui seul en appellent les pauliniens avertis et convertis. La division semble fonder sa raison dans la pratique de l'immersion. L'apôtre « rend grâce » de n'avoir immergé que très occasionnellement (1 Co. I, 14-16) et, par conséquent, de n'avoir point de responsabilité dans les conflits. Si l'on en croit l’auteur des Actes, Apollos est fondamentalement attaché à la doctrine (essénienne) de Jean le Baptiste (voir Ac. XVIII, 24-25). L'on doit donc retrouver en son enseignement et en le rituel qu'il pratique l'appel au repentir et l'engagement envers la loi de Moïse (selon la vision apocalyptique que l'on prête au prophète). L'initiation (clé de la Communauté des Saints), laisse une large part à la purification par l'eau.
Cependant, le renoncement au mal et la conversion au bien sont la condition sine qua non pour accéder à ce rituel, « car [l'impie] est impur tout le temps qu'il transgressera la parole. » (Règle V, 14). Le volontaire pour la « Nouvelle Alliance » de Dieu s'engage à se convertir à la Torah, c'est-à-dire à recevoir la loi de Moïse en sa juste interprétation, qu'il soit Hébreu ou Prosélyte (Ibid. 7-10).
L'immersion complète constitue un moment du rituel de la conversion à la religion des Hébreux. Il suit la circoncision qui marque l'entrée dans l'Alliance d'Abraham et la conversion à la Torah. Le bain rituel (« miqveh ») est l'unique moyen de purification des hommes aussi bien que des choses. L'homme qui pénètre dans le « miqveh » (retenue d’eau) doit être parfaitement propre. Toute saleté constituerait un empêchement au pouvoir purificateur du bain rituel. Notons la critique d'un Essénien : « Un baigneur du matin : Je vous reproche, Pharisiens, de prononcer le nom dans un corps encore impur. » (Tf. Yadayim II, 20).
L'immersion semble tout aussi incontournable en tant que rituel d'initiation et d'entrée dans la Communauté nazaréenne. Pratiquée par Képhas, elle doit probablement trouver son originalité dans un accommodement nazaréen du rituel essénien (ou johannique) qui gomme la prééminence de Jean. A la purification par l'eau (la prérogative sacerdotale de la loi), s'ajoute la puissance ignée du pouvoir royal (le discernement des esprits, dans l'engagement de la lumière contre les ténèbres).
Paul n'est pas attaché à une légalité qui heurte ses convictions et témoigne nécessairement d'une conversion à la Torah. Le rituel de l'engagement dans la Communauté semble même constituer l'essentiel de la contrariété :
« Le Christ ne m'a pas en effet envoyé immerger mais évangéliser. » (1 Co. I, 17)
L'évangile est (devenu) incompatible avec l'immersion, puisque celle-ci ne se détache point de la légalité. L'idée du repentir et celle du retour zélé à la Torah sont loin d'être pauliniennes : « Si je rebâtis ce que j'avais défait (la Torah), je confirme ma transgression. » (Ga. II, 18). Elle est johannique (ou essénienne) et probablement nazaréenne : « Ils étaient immergés par [Jean] dans le cours du Jourdain et avouaient leurs péchés. » (Mt. III, 6). L'on comprend qu'au jour de sa conversion, l'apôtre ne se soit pas précipité pour se soumettre à l'autorité de Jacques ou de Képhas (Ga. I, 17).
Pour Paul, la grâce constitue la réponse de la foi en la puissance du dieu qui abroge la loi. Dieu lui-même la donne gratuitement, « sans repentir » (Rm. XI, 29) à « ceux qu'il a connus d'avance » (Rm. VIII, 29). L'esprit qu'elle communique fait de l'homme « un enfant de Dieu » (Rm. VIII, 16). Le rituel d'immersion, par le geste de l'officiant, crée un attachement à celui-ci qui porte déjà le germe d'une chapelle (1 Co. I, 12). Il contribue à maintenir l'homme dans une relation légale et l'attache à des références terrestres.